— Denis, pourquoi as-tu écrit sur tout ça ?
— Comment cela t’est-il venu ?
La mort est une question en forme de préambule qu’il faut affronter pour vivre en conscience, pour stimuler un questionnement existentiel; écrire c’est écrire sur la vie, sur la mort, sur la condition humaine en intégrant la dimension verticale de l’être humain.
La sexualité est une question, parfois un problème; elle interroge beaucoup de personnes ou devrait les interroger dans une société judéo-chrétienne qui dans ses fondements a mis le sujet sous le tapis. Dans sa période matérialiste elle a jeté Dieu avec l’eau du bain en le noyant dans la laïcité pour se “moderniser”. Une société capitaliste et maintenant financière imbue d’elle-même qui au cours de sa mutation a certes autorisé une libération sexuelle nécessaire mais devenue souvent aliénante et paradoxalement dévoyée, au sens du dictionnaire: – Qui est sorti du droit chemin. Je veux dire par là une société qui a “dés-intégré” la sexualité, jeu de mots pour dire que la sexualité pose toujours question! Ainsi, ce ne sont pas les comportements ou orientations sexuels qui interrogent, mais notre rapport à l’énergie sexuelle, dans une même aventure élevante et épanouissante. J’ai écrit sur ce sujet en m’appuyant sur cette idée que la déviance ou la pathologie dans le domaine de la sexualité ne relève pas des différentes catégorisations normatives mais d’une dégradation de sa fonction: – donner la vie et du plaisir qui ne soit pas un obstacle à la noblesse véritable et à la quête spirituelle, mais leur célébration. Le sujet est si lourd que pour tout membre de la communauté occidentale un travail de catharsis, de réappropriation et d’intégration se pose en ces termes.
Quant à l’abus de pouvoir lié à la sexualité, il est le leitmotiv commun à nos villes et nos campagnes (ou nos compagnes) depuis des décennies, des siècles, des millénaires. Si je n’ai pas été moi-même abusé sexuellement dans mon enfance, j’ai depuis toujours été confronté aux violences sexuelles subies par des personnes de mon entourages, j’ai côtoyé des victimes et des bourreaux, le plus souvent dans le milieu ecclésiastique. Chacun d’entre nous directement ou indirectement est concerné par ce mélange explosif de l’exercice conjoint du pouvoir et de la sexualité au détriment de la dignité humaine, lorsqu’il permet l’expression de pulsions sexuelles aliénantes et destructrices très longtemps couvertes par les autorités de tous ordres. …Une catharsis nécessaire pour se défaire de ce que notre société porte en elle et pour croire encore en la vie.